Hommage à Madame MAGEOT Renée.

Par Prosper Indo

Madame Mageot Renée est née dans la famille Perreira, mais nous l’appelions MATERNELLE. Née le 6 janvier 1927, elle aura vécu 90 pleines années, conforté par un heureux mariage d’amour, noué à 20 ans, le 8 février 1947, avec monsieur Joseph Mageot. Son époux était surnommé John Wayne, tant il avait la corpulence et la dégaine de « L’homme tranquille » et du héros de « La taverne de l’Irlandais ».

Très attachée à l’égalité homme-femme et à la loi du genre, Maternelle eût six enfants, 3 filles et 3 garçons, qui lui donnèrent de nombreux enfants et arrières petits-enfants. On pourrait penser que cette nombreuse descendance symbolisait une réussite. Il n’en est rien. En réalité, Maternelle avait une stratégie cachée : en vraie mère-poule, elle s’était mise au basket-ball pour avoir ses trois filles sous surveillance et, surtout, pour écarter les importuns qui venaient tourner autour de ces dernières. Cette stratégie échoua, le basket prit le dessus et Maternelle se trouva prise au jeu. Le basket prit le dessus. Heureusement, car la présence tutélaire de Madame Mageot rassura les autres mères de famille. Ces dernières autorisèrent leurs filles à s’inscrire au basket. Par son exemple, Maternelle aura contribué à la notoriété et au développement de ce sport !

Très tôt, et avant tout le monde, Maternelle joua la parité : Monique et Josette étaient inscrites au Trésor Hit Club, elle enrôla Paulette à ses côtés, dans l’équipe des Harlem Black Star de Bangui. Deux contre deux !

C’était la belle époque des grands tournois de basket-ball, où les enfants de Lakouanga jouaient à la Route 37 ; ceux de Fatima rencontraient les jeunes de SICA I, le Red-Star rivalisait avec l’équipe de l’ASOPT et les scolaires du Collège Saint-Paul des Rapides défiaient l’équipe du Lycée Barthélémy Boganda. Le basket rassemblait toutes les filles et tous les garçons de Centrafrique, sans considération d’origine, de milieu social, de sexe, de race ou de religion. Par la magie du sport, la réputation du pays avait franchi les frontières et, mêmes les Américains n’étaient pas les derniers à venir donner la réplique à la sélection nationale.

Maternelle fut prise dans la tourmente et endossa rapidement la tunique de l’équipe nationale féminine, pour les compétitions internationales.

Jeune d’esprit, d’un tempérament direct mais d’une grande bienveillance, Maternelle gagna le respect et l’affection de tous. Même ses adversaires l’appelaient Maternelle. Dans un pays, la RCA, où les mères de famille sont honorées plus que partout dans le monde, en particulier à l’occasion de la Fête des Mères, cette grande Dame symbolisait l’amour maternel et, à elle seule, représentait toutes les femmes de Centrafrique. A ce titre, elle mérite de rentrer dans le grand livre des « Mamans Décorées ».

La porte de sa maison à la Cité Saint-Christophe était toujours ouverte à tous et y gagna un nom : Le Sympathique. Sympathique, oui, Maternelle était cool, comme disent aujourd’hui ses petits-enfants.

Voilà pourquoi je la vois partir avec tristesse, mais aussi avec beaucoup de confiance. Car je sais que là où elle va, au Paradis, ils seront nombreux à la droite du Père à lui faire la haie d’honneur. Ils ont pour nom François Péhoua, Marie Zomoka, Sabin Kotéké, Mama Capi, Jean Bengué, Barnabé Sangha, Igor Follot, Jean Mailli… Ils forment une belle et scintillante équipe, celle des Étoiles du basket centrafricain. Comme à son habitude, Maternelle jouera arrière, intraitable à la défense, un sourire timide au bord des lèvres, surtout lorsqu’elle fera la faute, l’air de dire : « Comment faire autrement ? »

Va, Maternelle, tu nous manqueras.

 

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