BASKET MACARA

Où l’école d’apprentissage des fondamentaux du coach Goundouwa

Par Dr. Crépin Kézza, Président du club Cosma de Saint Laurent du Maroni, Guyane

Le matin de bonheur, les enfants débouchèrent de tous les coins, de toutes les ruelles, habillés de short, et d’un maillot. Certains étaient pied-nus, d’autres avaient les pieds dans des « baskets », allant d’une vétusté totale au « dernier cri » de chaussures. La vedette des chaussures était le modèle grillage plastique « djogo-djogo » alias baba à dô pourou. Tous ces enfants âgés de 7 à 12 ans, garçons et filles, se rendaient au Centre National Martin Ngoko pour prendre part à un évènement sportif de renommée le « BASKET MACARA ». On y retrouvait les enfants proches du Centre National de basketball Martin Ngoko, des résidences 200 Villas, Ben-Zvi, 36 Villas, Cités UDEAC et OCAM, aussi bien ceux des quartiers proches tels, Camp Fidel Obrou, Boy Rabe, et même plus éloignés à savoir Foûh, Gobongo, Castors, Sica I, II et III, tout comme KM5, et Fatima.

Le « Basket Macara », invention d’une des plus grandes figures des cadres d’encadrement technique du basketball centrafricain le regretté Georges Goundouwa, était un événement sportif très attendu par « les jeunes basketteurs de la capitale », souhaitant pour certains découvrir le sport roi de la Centrafrique, pour d’autres améliorer leur pratique du basketball dans le sillage leurs ainés. Une invention de génie qui permettait à tous les jeunes « Banguissois » quelles que soient leurs conditions sociales, économiques, ethniques et religieuses de se retrouver sur un terrain de basket et pratiquer l’art de Martin Ngoko, de Fréderic Goporo et tant d’autres. Le concept MACARA* permettait de faire des récompenses (après l’effort le réconfort…)- le MACARA répondait aussi à une difficulté sociale de beaucoup d’enfants qui n’avaient pas la possibilité de prendre un petit déjeuner le matin avant de pratiquer leur sport préféré. Le Macara répondait au principe de ventre vide n’a point d’oreilles et Dieu sait, combien il fallait avoir les oreilles attentives pour suivre les consignes du coach Georges, lesquelles consignes étaient reprises par ses assistants Johnny Madozein, regretté Camille Youfeigane, Larry Devaux Yaganda, mais aussi leurs collègues féminins Yannick Kottaud et Gertrude Moussa (hé oui nous avions déjà à cette époque des jeunes cadres femmes de talent) …pour ne citer que ceux-là.

Aux programmes d’enseignement des fondamentaux de l’école, cet entraineur créatif, rigoureux et très pragmatique avait toujours sur son planning:

  • L’apprentissage et les techniques d’un bon shooteur (Alignement coude – épaule – poignet, casser le poignet et allonger votre bras, rotation du ballon vers l’arrière, fléchissez vos jambes, et les yeux sur la cible « l’anneau »).
  • -Les différentes sortes de passe à une main, deux mains, à la poitrine, et avec rebond. Fast break et Lay ups.
  • -Les techniques de base pour dribbler et le maniement du ballon de la main droite et main gauche. (Touchez le ballon du bout des doigts et non avec la paume, baissez-vous, gardez la main au-dessus du ballon, conservez le ballon bas, et levez la tête).
  • -Tout cela suivi par une série de dribble avancée comme le changement de direction avec le cross (hé oui déjà à l’époque on nous enseignait cette merveille de la NBA, le changement de direction en passant la balle entre les jambes ou derrière le dos. Assez souvent par manque de matériel nécessaire, adéquate et moderne, il utilisait des chaises pour illustrer ses exercices de perfectionnement.

 

La soirée se terminait toujours par une compétition de 3 contre 3 sans dribble,

Ensuite, on passait aux matchs de détection 5 contre 5 demi terrain, où une équipe est torse nu et l’autre en maillot pour lui permettre de faire la distinction entre les deux équipes.

C’était une école de basket accélérée qui se déroulait sur 3, voire 5 jours et à l’issue de ce stage certains jeunes étaient retenus pour la sélection des benjamins qui allait poursuivre cet apprentissage tous les après-midi au CNBB Martin Ngoko de 15 à 17h. Les moins chanceux repartaient avec quelques beignets dans le ventre mais surtout un  bagage assez important en fondamentaux qui sera à parfaire dans leur différent club. J’ai eu l’opportunité en tant que poussin de participer à ces moments d’apprentissage du basket autour de quelques beignets (qu’ils étaient bons ces beignets !!!), mais j’ai aussi eu la chance alors que je n’étais que poussin de connaitre ma première sélection benjamine pour aller rejoindre des jeunes joueurs talentueux tels,  Marcel Bimbo Ballu, Zawas, Eric Bawara,  Flavien Mbarindji,  Clotaire Mbaye, Patrick Ferreira, Yannick et Claude Mbédo, Moctar Cissoko alias « MAUDIT »,  Simon Vélémalé alias « Moustique », Gabin Sambo alias « DJOCKY » sans oublier mes deux autres camarades draftés MACARA, Patrick SAY et Parfait Kongo (désolé pour ceux que j’ai oublié)

A l’instar des matchs de détection en France, le festival BASKET MACARA était un moment capital pour attirer et former les plus jeunes basketteurs. C’était aussi un vecteur de cohésion sociale car pendant cette semaine, les enfants des nantis côtoyaient les enfants de condition modeste, les chrétiens partageaient le ballon avec les musulmans, les blancs, les noirs et tous apprenaient à donner le meilleur d’eux-mêmes pour que leurs équipes gagnent les MACARA ; si on sait s’unir pour gagner les Macaras on saura s’unir pour donner le meilleur de soi pour gagner YASSITOUNGOU !!! Qui vole un œuf volera un bœuf peut être traduit par qui gagne un Macara gagnera la coupe d’Afrique des nations !!!

Cette unique initiative a été mise en place en 1982 et Il est vraiment regrettable que depuis la disparition du fondateur George Goundouwa cette école magique, qui avait pour objectif d’enseigner aux jeunes les fondamentaux du basketball et de leur donner à manger à la fin de chaque séance n’existe plus de nos jours. Il m’arrive de lire par ci par là, des projets de reconstruction de notre équipe nationale, mon analyse est qu’on ne peut reconstruire que par le bas !!! Georges était un excellent pédagogue, du haut de ses 1,65m il imposait le respect par sa maitrise de l’enseignement des fondamentaux du basket. Sa passion c’était le mini basket. Il passait un temps fou avec les jeunes talents pour leur inculquer les bases du basket, une de ses meilleures réussites est Fred Goporo, mais on peut ajouter quasiment tous les meilleurs meneurs de jeu du basket centrafricain. Il est temps que les dirigeants du basket rendent hommage à ce grand homme, en perpétuant ses grands projets:

  • Redynamiser les championnats du mini basket,
  • En reprenant l’organisation du BASKET MACARA,
  • En accompagnant la formation des meilleurs jeunes talents dans des écoles de basket et des sélections de différentes catégories de jeunes.

Puisse les âmes bienveillantes, amoureuses de la reconstruction du basket Centrafricain, soient touchées par cet appel à la remise en place du basket Macara, et se manifester pour que revive le basketball centrafricain.

« Maboko na mabako, é zia ndembo ti nzangui, a ti apé »

*Macara= beignet ou gâteau

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